25 — 28.05.2023

Claire Cunningham Glasgow

Thank You Very Much

danse / théâtre

KVS BOX

Accessible aux personnes en chaise roulante | Anglais → FR, NL | ⧖ 1h30 | €20 / €16 | Re-creation | Représentation relax*

Pleins feux sur les paillettes et le monde mystérieux des sosies d’artistes, ces doubles de popstars célèbres. Pour rendre hommage aux vedettes du show business, iels incarnent leurs idoles jusque dans les moindres détails : leurs gestes, leurs expressions, leurs voix et leurs costumes. Claire Cunningham, s’identifiant comme artiste et chorégraphe porteuse d’un handicap, nous invite à découvrir ce monde singulier. Elle s’empare du phénomène des artistes sosies pour s’interroger sur les notions d’identité, d’acceptation et le défi que constitue le fait d’être soi-même, en compagnie d’artistes également porteur·euses de handicaps. Qui tentons-nous d’être tout au long de notre vie ? S’agit-il d’un véritable choix ? Habillé de costumes scintillants, l’ensemble adopte la perspective du sosie pour déconstruire le mythe du corps idéal et contester, avec l’humour qui caractérise Cunningham, la perception sociale de la normalité. Une performance enjouée et originale qui oscille entre joie et désespoir, réflexion et émotion. Existe-t-il un défi plus grand dans la vie que celui d’être soi ?

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Thank You Very Much

Claire Cunningham est l’une des chorégraphes écossaises les plus célèbres et dynamiques de ces dernières années. De ses œuvres en solo Mobile et Evolution, à son examen de reprises d’Elvis Presley dans Thank You Very Much, en passant par ses explorations de la religion (Guide Gods) et une œuvre créée pour une galerie, les spectacles de Cunningham révèlent une imagination infatigable et une approche novatrice de la chorégraphie. Sa démarche est fermement ancrée dans son expérience vécue en tant qu’artiste s’identifiant comme ayant d’une déficience physique, et dans un activisme bienveillant qui remet en question les notions de corps normatif. En intégrant trapèze, danse, chant et texte dans ses productions, Cunningham a créé une série de spectacles qui questionnent simultanément les idéaux traditionnels de la physicalité et le potentiel de la théâtralité, tout en conservant une rigueur intellectuelle et un désir de forger une relation plus accueillante entre les artistes, le public et les espaces qu’iels partagent.

« Je pense que mon travail se situe dans le cadre de la danse contemporaine, mais il comporte toujours beaucoup de texte », commente-t-elle. « Il peut s’inscrire autant dans le contexte de la danse que du théâtre. Il convient très bien aux publics qui veulent des histoires, des récits et des textes, car il en comporte généralement beaucoup. » Si le contenu et le style de ses productions sont accessibles – la chaleur avec laquelle elle parle des reprises qui ont inspiré Thank You Very Much confère à une communauté invisible d’artistes une présence et un caractère commun, elle ne craint pas de s’attaquer à des concepts sérieux. « J’aime prendre des idées compliquées ou personnelles – pour moi – ou nuancées sur la politique de la déficience et les ouvrir de manière à ce qu’elles soient faciles à comprendre, en particulier s’il s’agit d’un nouveau concept sur la manière dont le public a pu percevoir la notion de déficience. »

Dans le cas de Thank You Very Much, Cunningham allie son enthousiasme d’enfance pour Elvis Presley avec des recherches sur les reprises et sa propre compréhension de la manière dont les idées normatives sur la physicalité imposent un vocabulaire de mouvement artificiel aux corps porteurs de déficiences. Alors que l’imitateur·ice suit une série de gestes prescrits pour reproduire l’apparence du roi du rock’n’roll, une personne ayant un physique différent ou une neurodivergence, est contrainte d’adapter ses mouvements et ses comportements. Plutôt que de marginaliser ou d’exclure les reprises, Cunningham a commencé par entreprendre des recherches sur la scène, en visitant le festival de Porthcawl [le plus grand festival consacré à Elvis Presley en Europe – ndlr] et en invitant certain·es des artistes à travailler avec sa troupe pour mettre au point le spectacle.

Après avoir monté le spectacle dans le cadre du festival international de Manchester en 2019, Cunningham l’a repris en 2021, « En plein milieu de la pandémie ! Nous avons dû le remanier pour cette raison. Il y avait beaucoup de précautions mises en place, ce que je voulais et respectais, mais avec une compagnie de personnes qui étaient vraiment à haut risque, nous nous demandions comment faire la tournée tout en nous protégeant et en protégeant le public. À l’origine, j’ai créé Thank You Very Much avec l’intention d’en faire un spectacle assez intime. Le public est proche, il est installé comme dans un cabaret ou un dîner-théâtre, et nous l’avons parfois invité à monter sur scène pour nous aider et interagir avec nous. Nous étions physiquement proches des gens. »

Cet aspect particulier du spectacle, qui brise ce que Cunningham considère comme le fossé entre le public et ce qu’elle appelle avec dérision « l’artiste sacré·e », représentait un défi particulier.

« Si je n’avais pas mis en place ces mesures, cela aurait été très hypocrite. Même si changer un spectacle était terrifiant, cela m’a aussi beaucoup renforcée et donné beaucoup de confiance. Nous avons été obligé·es de nous demander ce qui est important et forcé·es de trouver de meilleures façons de faire les choses en cours de route. La manière dont je conçois la politique de la déficience, à savoir que les choses ne doivent pas nécessairement avoir la même apparence sur un corps et sur un autre, peut également s’appliquer à une chorégraphie. Le spectacle ne cesse d’évoluer, ce qui est très sain. »

Au cœur de Thank You Very Much se trouvent une attitude et une esthétique qui se sont développées tout au long du parcours créatif de Cunningham : le désir de remettre en question les idées reçues sur les aptitudes physiques et de retrouver la connaissance qu’ont les individus de leurs propres besoins et de la capacité de leur corps.
« C’est inhérent à la création de l’œuvre : encadrer l’expérience vécue de la déficience selon mes propres termes, reconnaître la connaissance de la mise à l’épreuve, quotidienne, des aptitudes, qu’elles soient physiques ou neurodivergentes, parce que vous devez constamment naviguer dans un monde qui n’a pas été conçu pour vous. Les systèmes et les structures, physiques et de communication, tout a été conçu d’une manière qui nous oblige à résoudre constamment des problèmes ; je pense donc que la pièce ne traite vraiment que de cette question politique. Aucune de ces connaissances n’a été perçue comme telle : nous ne sommes jamais, historiquement, reconnu·es comme des experts de nos propres corps ».

Les premières expériences de Cunningham avec la danse l’ont convaincue qu’une autre approche était possible. « Lorsque je suis arrivée à la danse, j’ai eu le sentiment que la chorégraphie consistait à naviguer différemment dans le monde. Nous devrions certainement nous intéresser aux personnes qui le font déjà : celles qui ont été activement exclues des espaces chorégraphiques. Thank You Very Much étudie un groupe d’interprètes, les artistes faisant des reprises, qui sont exclu·es des sphères chorégraphiques du grand art, et inscrit leurs processus dans une chorégraphie qui célèbre la différence, remettant finalement en question l’idéalisme normatif du théâtre lui-même. »
« Une grande partie du travail que j’ai effectué avec Jess Curtis consistait à reconnaître l’incapacité inhérente au système théâtral : on attend d’un corps bipède qu’il puisse monter et descendre des escaliers, que sa vue et son ouïe soient pleinement opérationnels. On attend des gens qu’iels restent assis·es et silencieux·ses pendant 80 minutes sans avoir besoin de sortir. L’idée que l’on se fait de l’être humain est très irréaliste et le théâtre a été construit en fonction de ces attentes : restez assis·e, soyez silencieux·euses, ne partez pas. Et il y a tout un tas de gens qui n’ont pas pu venir parce que le théâtre n’est pas accueillant. Mon travail consiste à faire face à cette situation et à me demander comment créer un espace accueillant et sûr pour un public plus large. »

  • Gareth Vile
  • Avril 2023
  • Gareth K Vile est critique de théâtre en Écosse. Son intérêt se porte de manière plus spécifique sur les performances ambitieuses et innovantes. Il enseigne aussi le Latin et est l’éditeur de la revue critique indépendante Edinburgisch Dramaturgie.

*Dans une représentation relax, les “règles” du théâtre sont relâchées au maximum. Les lumières ne sont pas éteintes et il est permis de parler, d'entrer ou de sortir. Une zone où vous pouvez prendre une pause est aussi mise à disposition. L’objectif ? Vous permettre de vous sentir à l'aise et de profiter du spectacle à votre rythme et selon vos besoins. 

 

Présentation : Kunstenfestivaldesarts, KVS
Concept et chorégraphie : Claire Cunningham | Dramaturgie : Luke Pell | Metteur en scène associé : Dan Watson | Scénographie : Bethany Wells | Création lumières : Chris Copland | Création sonore et composition : Matthias Herrmann | Costumes : Shanti Freed | Performeur·ses : Claire Cunningham, Tanja Erhart, Vicky Malin, Jo Bannon | Scénographie : Bethany Wells | Manager de production : Emma Jones | Manager de tournée (Bruxelles et Hannovre) : Courtland Evje | Production exécutive pour Claire Cunningham Projects : Nadja Dias | Production pour Claire Cunningham Projects : Vicky Wilson | Directrice de la compagnie : Fiona Kennedy | Régisseuse : Anna Booth | Supervision lumières : Chris Copland | Supervision son : Chloe Coll
Production : Manchester International Festival et National Theatre of Scotland en association avec Claire Cunningham Projects et Kunstenfestivaldesarts | Commandé par Manchester International Festival et National Theatre of Scotland, et Perth Festival en association avec tanzhaus nrw et Dance Umbrella 
Ce projet a été soutenu par la National Lottery via Creative Scotland
Performances à Bruxelles avec le soutien de Europe Beyond Access du British Council

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