20 — 24.05.2019
Est-ce que s’en tenir à une seule sexualité spécifique est une forme de refoulement ? Au détriment de qui ? Au détriment de quoi ? Il est temps de démêler ce nœud dont on ne connaît parfois même pas l’existence. L'artiste canadienne Dana Michel transgresse les conventions avec ses chorégraphies audacieuses. Par le biais de la danse et de la performance, elle façonne différents corps et idées qui abandonnent les sentiers battus du physique et de l’identité stéréotypés. Son œuvre se définit le mieux à travers les influences dont elle est imprégnée : la sculpture, le cinéma, la comédie, la psychologie et la réflexion sociale. Dans ses œuvres précédentes, Dana Michel analysait le refoulement de l’identité culturelle. Sa nouvelle création, CUTLASS SPRING, fouille les multiples facettes de la sexualité humaine. Michel explore la manière dont le refoulement culturel et sa vie de performeuse, de mère et d’amoureuse ont modelé son identité sexuelle.
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I
Elle ne figure pas dans leur pornographie. On ne la trouve pas dans leur érotisme.
Elle ne fait même pas partie du monde de leurs fantasmes.
CUTLASS SPRING, c’est ce que le sexe peut signifier pour moi en ce moment.
Je vais vagabonder dans une question : comment puis-je situer mon identité sexuelle au sein d’une multitude d’identités complémentaires et en apparence contradictoires – en tant que performeuse, mère, fille, amante, étrangère ? Je vais cartographier mon éducation sexuelle – avec toutes ses incarnations, ses fabrications et ses dissociations. Je vais suivre ces trajectoires vers leur essence la plus douce afin de découvrir ce que je ne dévoile pas et ce que je rends explicite.
Elle va solliciter son corps et toutes les choses qui font partie de sa personne. Elle va prendre conscience de ce qu’elle garde en elle pour une contemplation sexuelle.
Avançant petit à petit vers la non-censure, engageant le potentiel infini des objets du quotidien, CUTLASS SPRING est à la fois un manifeste et une réflexion enflammée, une ethnographie de la compréhension sexuelle et une archéologie du désir.
Dana Michel & Michael Nardone
II
Pas de positions fixes
Pas de positions fixes
Pas de positions fixes
Un mélange d’improvisation intuitive, de chorégraphie et d’art de la performance : ma pratique artistique est enracinée dans l’exploration de la multiplicité d’identités. Je travaille avec des notions d’alchimie performative et de rêve lucide – je me sers de mon histoire personnelle, de préoccupations actuelles et de désirs futurs pour créer une centrifugeuse empathique de moments publics entre moi et des témoins.
Aujourd’hui, on peut peut-être décrire mon travail à travers ce qui m’influence et m’habite : la sculpture, le cinéma, la comédie, le hip-hop, la psychologie, le dub et le commentaire social.
Dans mes recherches, j’alterne le travail qui se déroule dans et en dehors de mon atelier. Après m’être plongée dans un sujet par le biais de l’écriture, de la lecture, de la vidéo et de la discussion – je détends ma concentration et je laisse le corps prendre le dessus. Je me nourris de son, de silence et de dissonance – parfois je gave mon corps et ma psyché de stimulants pour connaître sa réaction. Ensuite, de minuscules détails émergent dans ma vision cinétique. Ils manifestent des mouvements, des résonances, des couleurs, des textures et certaines expériences lumineuses. Ces détails clarifient la trajectoire de mon travail. L’utilisation de la difficulté comme méthodologie de la navigation me vient naturellement et contraint mes spectacles à se rendre dans des lieux d’urgence et de vulnérabilité. C’est là que je peux écouter au plus près et partager avec le moins d’hésitation. Penser à des êtres comme à des épreuves mathématiques ou à des portails composés de milliards de possibilités approfondit cette écoute.
Mon offrande est un recueil qui reste ouvert à l’interprétation, un vaste espace de rencontre et d’accroissement de sa propre logique visuelle et expérimentale.
Dana Michel
III
Lorsqu’on passe une vie à refouler dans un domaine, cela entraîne sans aucun doute des refoulements dans d’autres domaines.
Il est temps de démêler le nœud dont je n’avais pas entièrement pris conscience (si, j’en avais conscience).
Pourquoi ne puis-je pas toucher les gens quand je ?
Pourquoi suis-je confuse quand il y a plus parce qu’affinités ?
Pourquoi je me fige à présent ?
Quelles sont les conséquences de tout ce refoulement ?
Quels autres dommages ont été causés ?
IV
J’ai toujours été obsédée par les « trucs du sexe ». Ma sœur beaucoup plus âgée que moi et diplômée en psychologie étudiait à l’université lorsque j’étais petite et j’ai passé mon enfance à furtivement me plonger dans ses manuels, toujours particulièrement fascinée par ceux qui traitaient de la sexualité humaine. Ces souvenirs ont refait surface l’année dernière, lorsque ma fille de cinq ans a suivi des ateliers spéciaux d’éducation sexuelle dans son école maternelle. Cela m’a fait penser qu’il était temps pour moi de renouveler mes connaissances en la matière.
Alors que je travaille avec le corps et le mouvement en tant qu’artiste du spectacle vivant, j’ai observé une déconnexion croissante avec moi-même en tant qu’être sexué ces vingt dernières années. La brèche qui s’accroît m’a frappé comme étant particulièrement troublante, moi qui ai toujours porté un vif intérêt aux questions sexuelles et un intérêt quelque peu latent (et rigolard, je l’admets) à vouloir devenir sexologue. Dans mes deux créations précédentes, j’ai dans une certaine mesure exploré la notion de refoulement – la façon dont j’ai refoulé certains aspects de mon identité culturelle et les répercussions d’un tel refoulement. Avançant dans le dévoilement de facettes enterrées de ma composition humaine, j’aimerais à présent creuser dans ce qui est devenu le mystère de mon moi sexuel et la façon dont cela m’affecte en tant qu’être humain, performeuse, mère et amante.
Quelques questions majeures, par exemple :
– Comment une vie de dissimulation affecte-t-elle la manière dont nous nous lions aux autres ?
– Quels sont les effets du refoulement sur la manière dont on aime, dont on partage l’espace physique avec les autres, et comment partage-t-on son corps avec les autres ?
Création et interprétation : Dana Michel
Élan artistique : Ellen Furey, Peter James, Mathieu Léger, Heidi Louis, Roscoe Michel, Yoan Sorin, Karlyn Percil, Alanna Stuart
Conseiller son : David Drury
Conception lumières : Karine Gauthier
Direction Technique : Caroline Nadeau et Karine Gauthier
Presentation : Kunstenfestivaldesarts, Beursschouwburg
Production : Dana Michel
Production déléguée : Par B.L.eux
Coproduction : Kunstenfestivaldesarts, Arsenic (Suisse), Bastard Festival (Norvège), Black Box Teater (Norvège), Centre Chorégraphique National d’Orléans (France), Centre National des Arts (Ottawa, Canada), Festival TransAmériques (Montréal, Canada), Julidans (Pays Bas), Montpellier Danse (France), Moving in November (Finlande)
Diffusion : Key Performance
Résidences de création : Beursschouwburg, Centre Chorégraphique National d’Orléans (France), Centre National des Arts (Ottawa, Canada), CounterPulse (San Francisco, États Unis), Dancemakers (Toronto, Canada), Galerie du Dourven (France), PAF - Performing Arts Forum (France), Par B.L.eux (Montréal, Canada), Usine C (Montreal, Canada), Reykjavik Dance Festival (Islande), Tanzhaus Zurich (Suisse)
Coproduit avec le soutien du Programme des artistes invités en danse une initiative conjointe du Conseil des arts du Canada et du Centre national des Arts
Dana Michel est artiste associée à Par B.L.eux.