16 — 21.05.2017
L’art peut-il changer le monde ? Pour Tania Bruguera, la réponse est oui. Célèbre pour une pratique sans concession mêlant actions, performances et installations, cette artiste et activiste cubaine interroge, souvent en lien avec l’histoire houleuse de son pays, le contrôle que le pouvoir politique et économique exerce sur nos vies quotidiennes. Son œuvre traite l’expérience individuelle comme le reflet d’une histoire et d’une mémoire collectives. Ses actions encouragent le spectateur à se confronter aux notions d’angoisse, de fragilité et de dépendance. Au Kunstenfestivaldesarts, Bruguera crée pour la première fois un spectacle de théâtre. Endgame est une mise en scène de la célèbre œuvre en un acte de Samuel Beckett, une pièce post-apocalyptique sur la mort et le désespoir à l’état pur. Pour Beckett, il n’existait rien de plus drôle que le malheur. Poursuivant dans cet élan, Bruguera nous révèle un texte de portée universelle sur la domination, le pouvoir et les limites de notre liberté sans limites.
Information importante pour les spectateurs : Le spectacle se déroulera sur un échafaudage. Le public entre dans l’installation et suit la performance debout. Pour votre confort nous vous conseillons de ne pas porter de haut-talons, de laisser vos sacs dans une consigne et vos manteaux et parapluies au vestiaire. Le texte intégral (en anglais) est disponible à notre caisse du soir. L’entrée du spectacle et la caisse du soir se trouvent rue Saint-Pierre 27, de l’autre côté du bâtiment.
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Artist Talk
Endgame
Endgame [Fin de partie] de Samuel Beckett est une pièce en un acte pour quatre personnages. Écrite en français, Beckett l’a lui-même traduite en anglais. La pièce a été jouée pour la première fois, en français, au Royal Court Theatre à Londres, le 3 avril 1957. Elle est considérée, au même titre que des œuvres comme En attendant Godot, comme l’une des pièces majeures de Beckett.
Personnages
Hamm – aveugle et paralysé.
Clov – le valet de Hamm, incapable de s’asseoir. Hamm l’a adopté.
Nagg – père de Hamm, cul-de-jatte, vit dans une poubelle.
Nell – mère de Hamm, cul-de-jatte, vit dans une poubelle posée à côté de celle de Nagg.
Interprétation
La pièce brosse le portrait d’un univers qui approche de sa fin, mais qui pourrait perdurer dans ses répétitions ; la fin vers laquelle tout semble s’orienter est à la fois certaine et insaisissable. Le décor et la situation suggèrent qu’il s’agit d’un abri souterrain, peut-être après une attaque nucléaire. Divers critiques ont identifié le monde stérile qu’on voit par la fenêtre à une apocalypse nucléaire, à la dévastation de la Shoah ou aux paysages ravagés à travers lesquels Beckett a roulé en Normandie en 1945 en tant qu’ambulancier volontaire pour la Croix-Rouge. L’atmosphère de mort et de désolation de Fin de partie adopte aussi le registre du deuil qui a frappé Beckett au moment de l’écriture de cette pièce. En 1954, il découvre que son frère Frank souffre d’un cancer du poumon en phase terminale. L’angoisse provoquée chez Beckett par la maladie et la mort de Frank, survenues au cours de l’année où il travaillait à Fin de partie, est omniprésente dans l’obsession de la « fin » qui hante la pièce de bout en bout.
La pièce expose une conscience de l’absurdité et de la futilité de la condition humaine, mais tente aussi de donner du sens à travers le langage et l’imagination. Elle présente un schéma cyclique de répétitions et une inévitable progression linéaire vers le néant.
Fin de partie n’est pas un texte autobiographique. Comme beaucoup d’œuvres de Beckett, elle dissimule toute évidence ou certitude de référence, de même qu’elle s’abstient de toute tentative, caractéristique de l’après-guerre, de traiter d’une quelconque expérience historique moderne : dans Fin de partie, il n’y a pas seulement pénurie de choses matérielles – les calmants, les dragées, les roues de vélo… Moins dicible, mais plus fondamentale, est l’érosion du sens, du système de valeur que requiert un tel sens de la tragédie. Dans la pièce, les parents sont chacun dans une poubelle, la mort de la mère est à peine mentionnée, la vue d’un enfant engendre une réponse meurtrière. La description de l’attitude de Hamm envers ses parents se compose de strates de parodie et de comédie noire. Mais la pièce recèle aussi un refus hautement subversif et choquant des valeurs de vie, de famille et de progrès. Fin de partie entraîne le mode littéraire le plus ancien et le plus vénéré de la tradition occidentale – la tragédie dramatique – dans une croyance tardive et une modernité perplexe.
Mise en scène
Tania Bruguera
Texte
Endgame de Samuel Beckett
Architectes
Dotan Gertler Studio
Avec
Brian Mendes, Jess Barbagallo
Voix
Jacob Roberts, Chloe Brooks
Création lumières
Rui Monteiro
Création sonore
Rui Lima & Sérgio Martins
Ingénieur sons
Pedro Lima
Enregistrement
Luke Martinez
Assistant mise en scène
Mitchell Polonsky
Direction technique
Patrícia Gilvaia
Production
BoCA Biennial (Lisbonne/Porto)
Direction de production
Ana Rita Osório
Production exécutive
Francisca Aires
Merci à
John Romão, Christophe Slagmuylder, Philippe Quesne, The Radcliffe Institute for Advanced Studies, Harvard College TDM, James Stanley, Achy Obejas, Tricia Van Eyck & MCA Chicago, Bob Wilson & The Watermill Center, Estudio Bruguera, New York City Players, Nicholas Elliot, Katiana Rangel, Regina Vorria, Alessandra Saviotti
Présentation
Kunstenfestivaldesarts, Hotel Marivaux
Coproduction
Kunstenfestivaldesarts, São João National Theatre (Porto), Colectivo 84 (Lisbonne), Théâtre Nanterre-Amandiers (Nanterre), Festival d’Automne à Paris, International Summer Festival Kampnagel (Hambourg), Estudio Bruguera
Avec le soutien de la
Fondation d'Entreprise Hermès, dans le cadre de son programme New Settings