04.05, 05.05, 09 — 12.05, 16 — 19.05, 23 — 26.05.2001
Depuis le film Adrift on the remains of a Grand Piano , présenté au KunstenFESTIVALdesArts en 1998, le groupe Maquette s'est transformé en Maquette X XX, à la faveur de nouvelles rencontres. Ces artistes-performers, sculpteurs et créateurs d’étranges costumes ont l’imaginaire organique et animiste : une branche morte, un os de baleine blanchi par la mer et échoué sur le rivage, des bris de miroir ou des morceaux de métal rouillé par l’averse ne sont plus pour eux objets déclassés. En chaque matière brute dort une statue à délivrer de l’oubli. Shame on Me , leur nouvelle installation, invite le visiteur à explorer les abords et l’intérieur de leur nouvel antre. A l’entour, quelques totems contemporains. Puis, une porte sauvage pour pénétrer dans les entrailles de la matière, irriguées de vie et de mouvante poésie.
Derrière chaque chose gisait une histoire. Celui-là seul qui connaissait toutes les histoires connaissait le monde. Il ne pouvait en être autrement. Mais derrière le monde tout entier avec toutes ses histoires, il y avait encore une histoire, qui était encore plus ancienne que le monde. Il faudrait que vous en veniez à connaître cette histoire.
Harry Mulisch, La découverte du ciel, Gallimard, 1999
Une galerie bruxelloise, le b-space.be. Un collectif d’artistes, Maquette X XX. Pendant neuf mois, ils dévoilent neuf installations multimédia, neuf ‘sculptures corporelles’, une par mois : neuf histoires, neuf ‘révélations’.
Le collectif d’artistes Maquette est actif depuis le début des années quatre-vingt. La plupart des membres de la première heure se formèrent à l’Ecole de Mime corporel dramatique d’Etienne Decroux, la célèbre école parisienne pour la danse et le mouvement théâtral. Les artistes de Maquette évoluent dans une zone frontière entre la danse, le théâtre, les arts plastiques, le cinéma, la musique et la photographie. La première application de la méthode des ‘révélations’ s’inscrivit dans le cadre de leur projet Wake : en 1995, en l’espace de 7 mois, ils produisirent sept performances différentes conçues comme des ‘révélations sculpturales’ qui, à la fin de l’année, se terminèrent en une synthèse, Great Wake. La première de leur film, Adrift on the remains of a grand piano, eut lieu lors du KunstenFESTIVALdesArts en 1998, tandis que, cette même année, ils rassemblaient en un livre les photos de ce cycle artistique : Juggler and the Juggled Joy. Cela correspond à la conclusion d’une première période dans leur travail.
Une nouvelle dynamique artistique germe alors pour Maquette X XX. En septembre 2000, la première ‘révélation’ d’un nouveau projet se déroule au b-space.be. Huit autres ‘révélations’ vont encore suivre. Celles-ci expérimentent différentes notions et formes de rencontre/contact. Elles déboucheront en finalité dans la performance E’motions - (Touch me). E’motions : c’est l’émotion et le mouvement (motion) en un tout, inséparables. Est-ce l’émotion qui génère le mouvement ou le mouvement qui propulse l’émotion ? Les neuf ‘révélations’ différentes explorent une dimension émotionnelle spécifique de la rencontre/du contact: shaman me(méditatif), à couteaux tirés - me (agressif), dimi’dium me (amoureux), take me in (émotif), frame me (communicatif), a’nima me (qui s’imprime), djinn me (qui délimite), adam adem me (qui étouffe) et in me (qui câline).
Les titres énigmatiques des ‘révélations’ dévoilent à leur tour la quête d’un monde authentique : " Est-ce le passé ou le futur ? Nous atterrissons! De retour à la maison ou très loin! Des porteurs qui portent... des images. Partout des lignes, des marques, des ondes... Sommes-nous en voyage ? Ou sommes-nous seulement à la recherche... Sommes-nous seuls ou ensemble? Un voyage avec nous-mêmes ? Pourquoi ce bandeau sur les yeux ? Chuuuuuut. Le reste suit... et bien en ligne! Calme! Calme, calme... Quelle interprétation ? Est-ce que nous y allons ou est-ce simplement abstrait, kitsch et incompréhensible ? Influencer, influencer, influencer... Cultures du monde... Quelles cultures? Un monde d’individus, chacun avec sa vérité, caché derrière une consommation injectée. Ma symbolique. Notre symbolique. " C’est le monologue intérieur de la confusion moderne qui transparaît ici et que les neuf ‘révélations’ tentent de conjurer.
Le terme ‘révélation’ correspond également à la notion de ‘work in progress’ : pas à pas, pendant neuf mois, la sculpture se révèle sous la présence du public. Neuf mois, c’est le temps d’une grossesse. Ce n’est pas un hasard si l’espace audiovisuel qui prend une place centrale dans la dixième installation, Shame on Me s’appelle ‘womb’ (utérus), un espace composé de matières ‘vivantes’ : bois, fer, plomb, pierre, goudron... C’est comme si ce ‘womb’ avait une vie organique et avait grandi tout autour des téléviseurs et des objets, les enveloppait pour mieux les absorber. Ceux-ci font référence aux neuf ‘révélations’ précédentes : le ‘womb’ en est littéralement fertilisé.
De l’extérieur, le spectateur voit les traces du processus créatif qui s’est déroulé. A l’intérieur, dans le ‘womb’ lui-même, il se retrouve entièrement intégré à un autre monde. Afin d’atteindre cette autre dimension à l’intérieur du ‘womb’, le visiteur doit franchir une porte qui a reçu le nom de HingeonMe. ‘Hinge’ équivaut à charnière ou gond. La porte est-elle une charnière vers une nouvelle réalité de perception ? Dans le ‘womb’, le spectateur sort-il de ses gonds habituels ? Une fois à l’intérieur du ‘womb’, il peut choisir parmi les films réalisés pendant les ‘révélations’. L’espace clos, la bande-son à plein volume et l’obscurité font du ‘womb’ une expérience complète.
Chaque histoire est le germe d’une autre histoire. Pour les artistes, le ‘womb’ est littéralement le germe d’un nouveau projet : la performance E’motions - (Touch Me) dont la première aura lieu en septembre 2001 et vise à offrir une synthèse de l’ensemble du projet. Ainsi, Shame on Meest une charnière entre les neuf ‘révélations’ et la performance. Son titre porte en lui l’écho de la première ‘révélation’ qui s’appelait Shaman me. Maquette X XX a élaboré sa propre langue rituelle multimédia afin de redécouvrir le monde, une langue dont la matérialité, la densité, le rythme sont aussi importants sinon plus importants que la tentative d’une définition logique.
Coproduction: Vlaamse Gemeenschapscommissie, Gemeenschapscentrum De Kriekelaar, b-space.be, Ministerie van de Vlaamse Gemeenschap afdeling Beeldende Kunst en Musea, Pix & Motion
Présentation: KunstenFESTIVALdesArts

